La magie rouge
n'est pas une magie à part entière ; on ne la rencontre
qu'associée à une rituélie le plus souvent issue de la magie
cérémonielle. La magie du sang n'est, en fait, qu'un apport d'énergie
dans un contexte rituel, même si certains rites ne peuvent (en
apparence) être effectués sans elle. Sa fonction, tout en étant
importante, reste cependant secondaire par rapport à la rituélie
employée. Il est nécessaire de connaître, à ce propos,
l'opinion de la tradition sur le sang, ce qui aidera à
comprendre les diverses variantes de la magie rouge, variantes
dont nous étudierons en détail les méthodes et les rituels.
Le sang, ce
liquide vital doué de très étranges propriétés en relation
avec celles de l'eau et quelques rites de la magie lunaire, a
fait l'objet de commentaires discrets dans toutes les
traditions. A titre d'exemple, voici ce qu'en dit la Bible, Bible
de Jérusalem, Editions du Cerf.
Genèse 9 : 4 et
9 : 5
«Seulement
vous ne mangerez pas la chair avec son âme, c'est-à-dire le
sang. mais je demanderai compte du sang de chacun d'entre vous.
J'en demanderai compte à tous les animaux et à l'homme, aux
hommes entre eux, je demanderai compte de l'âme de l'homme.»
Deutéronome 12 :
13
«Garde-toi
seulement de manger le sang, car le sang, c'est l'âme, et tu ne
dois pas manger le sang avec la chair. »
Dans la tradition
hébraïque, le sang est assimilé à l'âme ; dans d'autres
croyances, le sang est la vie ou le réceptacle de l'étincelle
divine qui habite l'homme. Simple question de vocabulaire, car
la quasi totalité des traditions convergent. Le liquide
nourricier a la réputation, quand il s'épanche, d'attirer irrésistiblement
soit les puissances innommables qui résident dans le Chéol,
soit les larves grouillantes qui peuplent le bas astral ou plus
dangereusement les morts. Le texte de Tony Faivre sur les
vampires est sur ce point très précis (Les vampires,
Tony Faivre, Editions Le Terrain vague, Paris 1962, page 27).
La croyance qu'un
corps mort peut désirer ardemment le sang d'une vivante est un
thème courant chez les auteurs grecs. Euripide représente
Achille dans une armure dorée, debout sur sa tombe et apaisé
par le sacrifice d'une jeune vierge dont il boit le sang. C'est
aussi du sang, mais d'une brebis cette fois, que boivent
avidement les ombres consultées dans L'Odyssée. A
Corinthe, les enfants de Médéa avaient, dit-on, coutume après
leur mort de tuer des nourrissons. Strabo, Pausanias et Aellian
racontent l'histoire de Temesa : le "démon" d'un
compagnon de L'Odyssée tourmentait après sa mort la
population de cette ville ; la pythie consultée déclara qu'il
fallait offrir une fois l'an au héros la plus belle vierge de
la cité... ( ce qui n'était pas un encouragement à la chasteté)
L'étude des
mythes et des rites sanglants conduit tout naturellement à
aborder le thème du vampirisme qui lui aussi appartient à la
tradition magique.
Le vampirisme
n'est pas ce que la vulgarisation et le cinéma en ont fait.
Le vampirisme est
une opération magique qui s'exprime généralement sous deux
formes. A un stade élémentaire, c'est une sorte de messe
rouge, opération nécromancienne qui vise à appeler un
"mort" en lui offrant durant de brefs instants le magnétisme
vital, issu du sacrifice d'un animal ou d'un être humain. C'est
l'épisode d'Ulysse dans L'Odyssée rappelant d'entre les
morts le fantôme de Tirésias pour l'interroger. Cette cérémonie
n'est en fait qu'un rituel de nécromancie amélioré.
Un grand nombre
de bricoleurs de l'occulte passent leurs soirées de nos jours,
à effectuer cette sorte de cérémonie dans les cimetières.
Ces pseudo messes rouges dont ils se glorifient (!) ne donnent
que des résultats très imparfaits et les risques encourus par
ces modernes nécromanciens sont disproportionnés avec les bénéfices
espérés, quand il y en a.
A un niveau plus
élevé et surtout plus sophistiqué, le vampirisme est une opération
rituelle destinée non pas à une simple évocation nécromancienne,
mais à la création d'une chaîne vampirique, dont l'opérateur
fait partie ! Bien que méconnus, ces rituels de vampires
existent ; on en trouve quelques exemplaires soigneusement
camouflés, sous une apparence banale dans de rares bibliothèques.
Le but ultime pour l'opérateur travaillant à partir de ces
textes, est de devenir lui-même vampire, c'est-à-dire d'acquérir
l'immortalité ou du moins une existence anormalement longue.
Seulement le rituel ne suffit pas, une minutieuse préparation
au niveau du mode de vie est nécessaire : le vampirisme n'est
pas donné à tout le monde, il y a des prédispositions que
nous étudierons en même temps que certains rituels.
Pour en revenir
à , les rituels traitant de la magie rouge et de vampirisme
sont des sciences particulièrement "discrètes" ainsi
que les rituels plus secrets traitant de la résurrection et du
transfert de conscience se rencontrent dans un grand nombre de
civilisations. Le vampirisme est traditionnellement originaire
de Transylvanie, la patrie de Dracula (qui a réellement existé
et qui se nommait en réalité Vlad Dracull). Cette magie
particulière provient des peuples Daces qui occupaient ce
territoire. Le vampirisme peu à peu s'est répandu en Macédoine,
en Grèce et en Europe occidentale. La véritable tradition se
retrouve encore dans certaines régions de Roumanie et
curieusement dans la ville de Venise, où quelques familles
conservent encore, peut être pas seulement dans leurs archives,
la totalité de ces pratiques ! Les rituels de résurrection
qui, eux, ne font pas toujours appel à la magie rouge sont plus
spécifiques des traditions hébraïque et tibétaine; les
transferts se rencontrent soit dans la magie arabe (mais très déformés,
ce qui semble indiquer qu'ils ne sont pas originaires de ces
peuples) soit dans la tradition magique du Tibet, de la
Mongolie, plus particulièrement chez les Bön-po (les bonnets
noirs). Il existe des équivalents dans la tradition
occidentale, sous une forme moins empreinte de mysticisme (nous
reviendrons sur ce point).
Ces pratiques
sont des domaines excessivement dangereux, où l'étudiant a de
fortes chances de laisser sa raison ou sa vie. Il convient de
n'aborder ces domaines qu'après une maîtrise totale, un long
entraînement et une assimilation parfaite des bases classiques
des arts magiques.
La magie s'étend
à d'autres domaines moins tragiques. Une grande partie de la médecine
magique fait appel aux possibilités du sang. Nous verrons à
quelle précision on peut aboutir et surtout la qualité des
traitements obtenus avec ces formes de thérapie. Le grand médecin
alchimiste Paracelse et certains de ses continuateurs, Van
Helmont ainsi que d'une manière plus éloignée le Chevalier
Digby et plus près de nous Alexander von Bernus, ont obtenu des
résultats spectaculaires dans ces domaines où se mêlent les
arts spagyriques, les traditions du golem et de la médecine
chinoise.
En résumé :
La magie rouge
est utilisée dans les rituels de :
1) Nécromancie (évocation
des morts).
2) La Goétie, évocation
des puissances de la ténèbre...
3) Les rituels de
résurrection.
4) Les rituels de
réanimation d'une momie ou dans ceux des morts vivants d'Haïti.
5) Certains
secteurs de la médecine spagyrique.
6) Les rituels de
création vampirique.
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