Sorcellerie

Elle a une assez mauvaise réputation, son seul nom fait frémir et certains refusent même d'en entendre parler. Cet à priori est absurde, mais peut parfaitement s'expliquer, du fait d'un manque objectif d'information. La plupart des gens confondent sorcellerie et satanisme, et font un amalgame entre haute et basse sorcellerie. Cette confusion, fréquente dans le domaine des sciences occultes, a été longtemps entretenue par l'église Catholique qui a toujours vu dans la sorcellerie une sorte de concurente dangereuse. De ce dernier point de vue l'église a une appréciation assez juste. La sorcellerie est une très ancienne tradition païenne dont l'origine se perd avec les premiers balbutiements magiques de l'humanité. La sorcellerie est la forme la plus pure de l'activité magique. Elle est essentiellement une communion avec les forces naturelles et utilise efficacement les potentialités de l'homme. Rien dans la sorcellerie qui ne soit en rapport avec les démons. Simplement une approche naturelle des forces et des énergies, ainsi qu'un entraînement qui vise une meilleure utilisation des possibilités de l'inconscient. A l'origine la sorcellerie était parfaitement intégrée à la vie de la communauté. Le sorcier ou la sorcière était considéré comme un personnage de savoir, il connaissait les herbes, les plantes qui guérissent, il était le magicien, le guérisseur, le thérapeute et le psychanalyste du village. Cette sorcellerie faisait l'objet d'un recrutement par cooptation, et n'était pas forcément héréditaire. L'enseignement s'effectuait de maître à élève, mais jamais il n'y a eu de groupement, d'école ou de "coven" comme on l'entend dire de nos jours. Le terme de coven désigne en Angleterre, des réunions de certains initiés qui, pour des raisons de fêtes traditionnelles ou saisonnières, (solstices, équinoxes etc...), se réunissent dans certains lieux privilégiés. Le terme de coven ne désigne pas autre chose. Quand aux sabbats, de fêtes rituelles issues des très anciens cultes de la génération qui réunissaient outre sorciers et sorcières, quelques personnes rendant le vieil hommage aux anciens Dieux. Les sabbats avaient souvent un caractère orgiaque, de même que les cultes de Priape et de Bacchus, ainsi que les cultes de Pan ou de Cernunos auxquels ils s'apparentent.

Dans le druidisme on retrouve le même phénomène de réunion pour des fêtes. Les druides et les bardes organisaient des rencontres traditionnelles dans la forêt des Carnutes aux périodes de solstices. Ces rencontres donnaient lieu à des confrontations d'opinions et des échanges d'informations et de con- naissances. Si le druidisme n'a pas été persécuté comme la sorcellerie, c'est qu'il s'agissait d'une structure à caractère religieux reconnu comme telle par les seigneurs. Le druidisme était hiérarchisé et organisé, la sorcellerie non. Une autre raison est que le druidisme s'est très vite fondu dans le catholicisme, un grand nombre de druides sont devenus des no- tables dans la hiérarchie de l'église. On retrouve dans l'ésotérisme chrétien un grand nombre d'éléments initiatiques d'origine druidique; la construction des cathédrales et de certains hauts lieux de la foi s'est effectuée sur des emplacement sacrés et les travaux ont été la plupart du temps dirigés par des druides de venus Abbés. Le meilleur exemple se trouve chez les Cisterciens. Les initiés druidiques ou bardiques qui n'ont pas suivi cet exemple, ont très vraisemblable- ment rejoint les rangs de la sorcellerie, ce qui explique que l'on retrouve dans celle-ci un grand nombre d'éléments en provenance du Celtisme.

En ce qui concerne le terme « Wicca » qui fleurit dans les revues actuelles (ainsi que dans certaines associations opérant un syncrétisme primaire entre sorcellerie, luciférianisme et magie cérémonielle, le tout sans aucun intérêt initiatique), ne fait nullement référence à une organisation sorcière, une institution ou à une école, il est une simple allusion à la witchcraft qui signifie le pouvoir magique, et par extension l'action de sorcellerie. Si la transmission de la sorcellerie a un caractère initiatique, ce n'est pas pour autant qu'il existait des écoles dans lesquelles on délivrait des diplômes. Tout au plus certains sorciers ou sorcières réputés regroupaient-ils quelques apprentis. Les gens du pouvoir étaient trop in- dépendants pour s'inféoder à un système et se regrouper en corporation. Le sorcier naissait libre et ne reconnaissait pour seules autorités que les forces de la nature. Il en va toujours de même. Faisant l'exercice de la même "profession", les sorciers se connaissaient entre eux, ou s'identifiaient facilement, il leur arrivait même de procéder à des échanges d'informations ou de connaissances. Parfois, ils confiaient leurs enfants à un spécialiste, afin que celui-ci les initie à son savoir-faire. Ce "tour de France" constituait un semblant de lien entre les membres de différents courants. C'est à l'époque de la christianisation de l'Europe que la sorcellerie prit le maquis. L'église qui promettait un paradis et des récompenses après une vie de macération et de sacrifices, voyait d'un assez mauvais oeil (sans jeu de mot) ces "initiés" indépendants qui commerçaient avec des forces inconnues, vivaient libres, insoumis et qui n'avaient pas honte de leur corps. La concurrence était dure, puisque le sorcier essayait plutôt de résoudre les problèmes immédiats de son patient, alors que l'église ayant un sens aigu de l'organisation, de la politique et du pouvoir, s'appuya sur les seigneurs qui devinrent rapidement son bras séculier. Le sorcier, trop marginal, devint un Hérétique et les hérétiques, c'est bien connu, font parti des suppôts de Satan. Le tour était joué, la sorcellerie était démonisée.

La sorcellerie ne fut pas détruite pour autant, elle continua, plus discrètement, et poursuivit une existence souterraine, se réfugia dans certaines corporations, forgerons, maréchaux ferrants, vanniers, potiers etc... Et perdura également dans certaines familles. Plusieurs provinces ont maintenu vivante cette antique tradition. On retrouve la sorcellerie en Normandie, en Bretagne, dans le Berry et au pays Basque. La tradition sorcière étant une tradition purement orale, il n'existe en fait aucun traité sur ces pratiques. Ce que l'on appelle grimoires, ne sont que des déformations de recettes plus ou moins bien transcrites et le plus souvent des altérations tenant plutôt de la mutilation de traités de magies cérémonielles. Les spécialistes des arts magiques ayant une bonne culture traditionnelle identifient assez facilement l'origine de ces livres totalement méconnaissables et bons pour les naïfs. Les dates que l'on rencontre sur certains d'entre eux sont souvent de la plus haute fantaisie. Elles sont généralement imprimées sur la page de garde pour mieux convaincre l'acheteur qu'il s'agit de textes rares d'une grande ancienneté. Il convient également de souligner que la quasi totalité des grimoires furent confectionnés, pour la plupart, au l8eme siècle et au 1geme. Navré de vous décevoir, si vous êtes un collectionneur fervent de ce genre de littérature. Le dragon rouge, la poule noire, les clavicules de Salomon, l'Agrippa, La magie rouge d'Aaron, la cabbale du papillon vert et bien d'autres font partie de cette catégorie.

Durant des siècles l'église, devenue toute puissante, persécuta la sorcellerie, on estime à plus d'un million le nombre de personnes victimes des bûchers de l'inquisition. Le plus étrange de l'aventure est que peu de sorciers véritables périrent de cette manière, car à côté de la sorcellerie "initiatique" de haut niveau, il existait une basse sorcellerie. Cette basse sorcellerie était principalement composée de gens ne faisant pas partie de la caste que formait la sorcellerie initiatique, qui était, rappelons le, plutôt constituée de fidèles des anciens cultes. La plupart d'entre eux ne possédaient pas les qualités requises pour subir avec succès l'initiation: entraînement insuffisant, tare, ou malformation congénitales contraignantes pour la pratique. D'autres raisons pouvaient être la cause de ce "rejet", notamment une disponibilité énergétique, inféodée par exemple à des blocages psychiques ou à des déviations. Des raisons morales pouvaient aussi être conséquence décisive, les êtres malfaisants où malsains étaient écartés de la pratique. La basse sorcellerie constitua très vite une sorte de "cours des miracles" où l'on trouvait pêle-mêle du bon et du mauvais. A cette catégorie "fourre-tout" se trouvaient mélangées des spécialités mineures, n'appartenant à aucune école initiatique et inclassables ailleurs, comme les jeteurs de sons, les rebouteux et les guérisseurs.

C'est sur cette catégorie que l'église jeta son dévolu, dans cette multitude se trouvaient également de véritables adorateurs du démon, des déçus de l'église ou des êtres pervers réfugiés dans la démonialité, moines défroqués en rupture de banc etc... Les arrestations étaient aussi arbitraires que peuvent l'être parfois les contrôles fiscaux de notre époque et l'issue tout aussi irrémédiable. Le pauvre bougre, le plus souvent dénoncé par un voisin ou un jaloux se retrouvait soumis à la torture, question ordinaire ou extraordinaire selon l'humeur du bon père Dominicain faisant office d'inquisiteur. Après quelques humiliations de base comme la visite méticuleuse du corps pour rechercher les "marques de sorcellerie", ou le viol collectif par les apprentis du bourreau, la tonsure des cheveux, et une ou deux séances de piqûres pour vérifier la sensibilité du corps, on pas- sait aux choses sérieuses. On faisait éclater les genoux en les enserrant dans un étau et en forçant à coup de maillets des coins de bois, on écrasait les pouces ou les orteils, on appliquait quelques bonnes barres de fer rougies au feu sur les organes sexuels ou des endroits "chatouilleux", bref, on entamait le dialogue. L'huile bouillante et le plomb fondu était pour la phase suivante, le sujet devenant ensuite difficilement utilisable. Après quelques jours de ce traitement, la victime devenait particulièrement conciliante, et avouait tout ce que souhaitait l'inquisiteur, mieux il en rajoutait pour faire bon poids. Les manuels d'inquisiteur sont assez éloquents à ce sujet. Ce sont de petits livres à l'usage des bons pères qui "proposaient des réponses". A la question: avez vous eu commerce avec le démon ? Combien de fois ? Son membre était-il écailleux ? etc... La malheureuse interviewée pouvait toujours répondre, non. Dans ce cas elle avait droit derechef à une nouvelle dose de fer rouge, et la question était reposée. A la fin elle répondait que oui, qu'elle avait connu charnellement le démon, que son sexe était écailleux, tordu comme un cep de vigne, et autres détails plus ou moins truculents. Afin d'abréger ses souffrances l'inquisiteur demandait alors si l'accusé connaissait d'autre sorciers ou sorcières. Le système fonctionnait à merveille et tous les voisins y passaient. Les frais de justice étaient payés sur les biens de l'accusé, ce qui en restait était dévolu à l'église! Voilà pourquoi il y eut tant de sorciers.

 

Le résultat de toute cette atroce épopée est que les seuls livres que l'on connaisse sur la sorcellerie, sont issues dans leur grande majorité des interrogatoires effectués par les inquisiteurs! On comprend pourquoi ce que l'on sait de la sorcellerie soit aussi déformé, et ne constitue qu'un ramassis de délires phantasmatiques de moines refoulés. C'est donc une "invention" totale de la sorcellerie qui a servi d'aliments privilégiés à la faune des satanistes et autres, qui ont érigé en vérité les perversions des inquisiteurs.

 

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